Pour clore le cycle national 2024, Marc-André Selosse, professeur au Muséum national d’histoire naturelle de Paris, a été invité à prendre la parole le 7 novembre lors d’une conférence portant sur « Les usages des terres et la préservation du vivant »
La terre sous nos pieds : un monde invisible et essentiel
L’intervention du professeur Marc-André Selosse met en lumière l’importance cruciale des sols, un monde souvent ignoré, pourtant essentiel à la vie sur Terre.
Loin d’être un simple support inerte, le sol est un écosystème complexe et dynamique, foisonnant d’une vie microscopique intense.
Cette vie souterraine, composée de bactéries, de champignons, d’amibes et d’une multitude d’autres micro-organismes, joue un rôle primordial dans la fertilité des sols et la santé des écosystèmes. Marc-André Selosse souligne que la biodiversité des sols est aussi riche, voire plus, que celle des écosystèmes les plus emblématiques, tels que les forêts tropicales ou les récifs coralliens. Un simple gramme de sol contient des milliers d’espèces de bactéries, de champignons et d’amibes, une biodiversité invisible mais essentielle.
L’intervention met en évidence les multiples fonctions de cette vie souterraine:
●Décomposition de la matière organique: Les microbes du sol, tels que les champignons, décomposent les feuilles mortes et autres débris végétaux, les transformant en éléments nutritifs utilisables par les plantes.
Ce processus de recyclage est fondamental pour la fertilité des sols.
● Altération des roches: Certains microbes accélèrent la dissolution des roches, libérant des éléments minéraux essentiels à la croissance des plantes.
● Fixation de l’azote: Certaines bactéries, notamment celles vivant en symbiose avec les légumineuses, sont capables de convertir l’azote atmosphérique en une forme assimilable par les plantes.
● Mélange et aération du sol: Les vers de terre, en creusant leurs galeries, mélangent les différentes couches du sol, favorisant son aération et la circulation de l’eau.
● Rôle des mycorhizes: Les champignons mycorhiziens, vivant en symbiose avec les racines des plantes, améliorent l’absorption de l’eau et des nutriments par les plantes, tout en les protégeant contre les maladies.
Le professeur Selosse insiste également sur l’impact des pratiques agricoles sur la santé des sols. Le labour, bien que considéré comme une pratique agricole traditionnelle, perturbe profondément la vie souterraine, entraînant une diminution de la matière organique, une augmentation de l’érosion et une perte de biodiversité.De même, l’utilisation excessive d’engrais minéraux et de pesticides affecte négativement la vie du sol, conduisant à une dépendance accrue à ces intrants.
L’intervention propose des solutions pour une gestion plus durable des sols:
● L’agroécologie: L’agroécologie consiste à appliquer les principes de l’écologie à l’agriculture, en favorisant la biodiversité et les interactions bénéfiques entre les organismes du sol.
● L’agriculture de conservation: L’agriculture de conservation, qui inclut le non-labour, permet de préserver la structure du sol et la vie souterraine.
● Le recyclage des déchets organiques: Le compostage et la valorisation des fumiers animaux permettent d’enrichir les sols en matière organique.
● La réduction de l’artificialisation des sols: Il est crucial de limiter l’expansion urbaine et la construction d’infrastructures sur des terres agricoles fertiles.
Le professeur Selosse conclut en soulignant l’importance de sensibiliser le public à l’importance des sols. Une meilleure compréhension du rôle crucial de ce monde invisible est essentielle pour adopter des pratiques plus durables et garantir la sécurité alimentaire des générations futures. L’intervention du professeur Marc-André Selosse nous invite à reconsidérer notre relation aux sols, à les voir non comme une simple ressource à exploiter, mais comme un écosystème précieux à préserver.